• chapitre 11

    Mizuki volait à travers les bourrasques de neige de plus en plus violente. Se concentrer sur les intempéries l’empêchait de repenser à Xylin et à la peine qu’elle avait provoquée. Même si elle savait à quel point ce départ était douloureux, il était nécessaire qu’elle le quitte pour poursuivre son chemin. Pour connaître enfin la réponse de la quête éternelle des hommes.

    Un énorme flocon s’écrasa alors sur son visage, l’aveuglant à moitié et elle fut précipitée au sol. Elle atterrit au milieu d’une congère glacée dont elle eut bien du mal à sortir mais en voulant reprendre son envol elle  s’aperçut que ses ailes mouillées par la neige refusaient de voler !

    -C’est bien ma veine ! Quelle idée j’ai eu de partir en plein milieu d’une tempête ! J’ai froid, je suis mouillée et je suis au beau milieu de nulle part ! protesta-t-elle dans… le vide. Evidemment personne à l’horizon pour écouter ses déboires.

    Elle se roula alors en boule au milieu de la neige et s’entourant d’une bulle d’eau –chaude – elle s’endormit.  

     

    Elle est au fond de son lit et elle gémit sous l’effet de la fièvre. Elle ouvre à demi les yeux mais aussitôt les referme. Tout est flou autour d’elle et ça lui donne le tournis. Une main fraiche se pose alors sur son front…

    -Papa !

    Elle ouvre les yeux ma tout a disparu : la fièvre, le mal de tête, la main fraiche tant désirée…

    -Eh bien alors tu m’avais dit que tu trouverais ton chemin mais tu es encore bien égarée.

    -Oh, le Shinigami. Tu vas me faire retourner dans mon monde ? demande-t-elle anxieusement.

    -Bien sûr que non. Tu as encore beaucoup de chemin à parcourir.

    Il essaye de dire autre chose mais déjà elle ne l’écoute plus. Soulagée, elle ne pense plus à lui. Elle veut juste continuer à rêver un peu plus.

    Un long couloir aux murs lambrissés semble s’étendre devant elle à l’infini. Elle s’avance et voie des tableaux qui ornent les murs. Elle se voit lorsqu’elle n’est encore qu’un bébé et qu’elle joue avec sa couverture. Plus loin elle dort en suçant son pouce. Elle passe rapidement devant les tableaux de sa petite enfance. Trois ans… Quatre ans… Cinq ans… On lui présente une nouvelle nounou et elle croit que c’est sa maman. Six ans… Sa nounou est partie, elle joue seule au milieu d’innombrables poupées. Sept ans… Elle lit au fond d’un fauteuil trop grand pour elle. Seule. Huit ans… Neuf ans… Douze ans… Son père est fier de ses notes et de ses réussites et elle est illuminée d’un vrai sourire. Treize, quatorze, quinze ans… Elle a compris que rien ne compte. Seule la réussite est fruit de « bonheur », elle travaille donc avec acharnement mais se sent vide. Seize ans. Elle est au sommet d’un immeuble sous la pluie battante. Le couloir arrive bientôt à sa fin. Seize ans et demi. Elle est parmi le village des Norix mais elle est toujours seule. Dix-sept ans. Elle avec Xylin en train de sourire joyeusement, heureuse d’être avec un être qui la comprend, heureuse de partager. Dix-huit ans. Elle annonce son départ. Trois autres tableaux suivent celui-là : elle, allongée dans la neige, elle dans ce même couloir en train d’observer les tableaux et… un jeune homme. Ses cheveux bruns bouclés tombent en vagues sur ses épaules et mettent en valeur ses yeux noisette pailletés d’or. Elle glisse le doigt le long de sa joue puis s’aperçoit que c’est la fin du couloir. Une porte se dresse devant elle. Sans hésitation elle tourne la poignée et…

     

    Elle se réveille. En même temps que son rêve a volé en éclats, sa bulle d’eau a disparue. Son rêve… De quoi a-t-elle rêvée ?

    -Un garçon… Je ne me souviens que du garçon. Comment s’appelle-t-il ?

    Reprenant pieds dans la réalité, elle réalise alors que le paysage autour d’elle est entièrement blanc. La forêt n’est plus qu’une vague ombre à l’horizon. Le vent la déportée bien loin…

    Petite silhouette solitaire perdue au milieu d’une étendue blanche, elle sourit. La neige lui procure un sentiment d’apaisement et elle décide de marcher dans la direction opposée à celle de la forêt. Ses petits pieds forment de minuscules empreintes dans la neige fraiche et elle s’amuse à faire des dessins en sautillant. Même à dix-huit ans on peut se permettre de gambader gaiement dans la neige. Surtout si personne ne peut nous voir…

     

    Elle aperçoit enfin les lumières d’un village au loin. Dans cette nuit noire elle ne l’aurait même pas remarqué sans les fenêtres illuminées.

    -Bon allons voir de quoi il s’agit. Depuis combien de temps je n’ai pas vu d’êtres humains ?

    Elle volète prudemment jusqu’à l’orée du village puis se glisse dans l’ombre pour qu’on ne la remarque pas. Il n’y a personne dans les rues, désertées à cause du froid. Mais elle voit tout de même les restes de batailles de boules de neige et des bonshommes de neige parsèment la rue principale.

    -Comme quoi, dans ce monde ci ou dans l’autre les enfants restent des enfants…

    Elle s’approche d’une fenêtre et voit une scène chaleureuse se dérouler devant elle : un père qui raconte une histoire à son petit garçon devant un bon feu. Elle s’éloigne et s’élève au niveau des toits. Une centaine de maisons semblent plantées au milieu de la lande déserte sans aucune logique. Une grande tâche noire sans lumière se trouve pourtant au beau milieu des maisons. Un parc.

     

    Les arbres ont l’air moins grand que dans la forêt. Les bosquets de fleurs ne sont qu’un pâle reflet de ce qu’elle trouvait en pleine forêt. Mais les allées droites la guident vers une fontaine qui glougloute doucement. Sentant la présence d’eau par tous les pores de sa peau elle se précipite vers elle. Elle en oublie ce  qui l’entoure et ne remarque donc pas les cinq ombres noires qui ont fait un cercle autour d’elle. Un filet s’abat. 

     

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     cette histoire a été entièrement inventée, merci de respecter l'auteure et de ne pas vous servir de ce texte à des fins personnelles