• la voie du papillon

    -J’y vais ! A ce soir !

    -Ne rentre pas trop tard Ayani !

    -Bien sûr que non maman ! Tu me connais…

    -C’est bien pour ça que je m’inquiète, grommela sa mère dans sa barbe.

    -Tu as dit quelque chose ?

    -Non, non amuse-toi bien !

    -Compte sur moi. Bisou.

    Après avoir dit au revoir à sa mère, Ayani s’engagea d’un bon pas sur le sentier qu’elle empruntait chaque jour depuis un mois. Il remontait le village puis faisait un crochet pour rejoindre les alpages où les bergers venaient conduire les moutons, mais elle allait encore au-delà, gagnant son petit paradis de verdure…

    -Bonjour Ayani ! Tu montes encore aujourd’hui ?

    -Oui, j’ai déniché un nouveau roman super intéressant dans le grenier hier. Bon je me dépêche, à ce soir Papi André !

    Papi André était le doyen du village donc il n’était pas vraiment affilié à Ayani mais tout le monde l’appelait comme ça. Comme tout le monde connaissait les grandes randonnées que faisait la petite Aya depuis bientôt plusieurs années. D’ailleurs tous les villageois aimaient cette jeune adolescente à l’esprit pétillant et rêveur. Et qui ne saurait tomber sous le charme de ses magnifiques yeux verts ?

    Ayani salua les villageois d’un sourire ou d’un signe de tête mais bientôt elle ne fut plus à portée de vue. Bien qu’elle soit petite, elle avait une bonne foulée, rythmée et infatigable, qui la portait où elle le voulait… ou plutôt là où sa tête la menait !

     

    Bien qu’il soit encore tôt, Ayani commençait déjà à avoir chaud. Plus vite elle serait en haut, mieux ça serait.

    Sauf qu’une fois arrivée à l’endroit habituel, elle s’aperçut qu’un berger y faisait déjà pâturer son troupeau.

    -Zut, je vais où maintenant ? Je ne vais pas faire demi-tour quand même…

    C’est en disant ces mots qu’elle aperçut un joli papillon butinant une fleur. Ses ailes blanches étaient striées de raies noires et deux yeux rouges s’étendaient au bas de ses ailes.

    -Qu’il est joli ! On dirait un apollon…

    Elle tendit la main pour attraper son appareil photo mais le bel insecte aperçut son geste et s’éloigna en voletant pour se poser sur une autre fleur quelques mètres plus loin. Pas à pas, Ayani le suivit donc ne se rendant pas compte à quel point elle s’éloignait du sentier, mais l’insecte la captivait tellement que le monde extérieur avait disparu. Ne restait plus qu’elle et le papillon…

     

    -Ouah ! Comme c’est beau ! Merci petit papillon !

    Après être montée derrière une petite crête, était apparue devant ses yeux une petite cuvette remplie de fleurs et de papillons ! Une fontaine de jouvence pour une rêveuse comme elle.

    D’ailleurs elle ne resta pas longtemps à l’observer de loin, elle voulait à tout prix se baigner le plus vite possible dans cette mer de couleurs chatoyantes et aux odeurs délicieuses. Le rose des orchidées sauvages se mélangeait au bleu unique des gentianes. Et pourtant ces fleurs si sacrées pour les montagnards se mariaient merveilleusement bien avec les coquelicots rouges ou les linaigrettes plus communes. De même la diversité des papillons contribuait à rendre cet endroit paradisiaque…

    Ce n’est qu’arrivée au milieu de cette petite prairie, qu’Ayani trouva un creux où s’allonger. Elle posa donc son sac, sorti de quoi grignoter en lisant puis se plongea dans sa lecture. La chaleur du soleil d’été était douce à cette haute altitude et le bourdonnement des insectes et des criquets résonnaient dans ses oreilles. Petit à petit, Ayani se focalisa sur la merveilleuse histoire que lui dévoilait l’auteur et oublia complètement le monde extérieur…

     

    -Pourquoi il fait si sombre tout à coup ? Je n’arrive plus à lire. Qu’est-ce qu’il fait froid aussi !

    En vérité le soleil commençait à achever sa course, et la nuit tombe vite en montagne. Ainsi que le froid qui va avec la nuit : une fois la lumière du soleil disparue plus rien ne réchauffe l’air froid en haute altitude…

    Ayani fouilla frénétiquement dans son sac à dos pour trouver sa polaire puis rangea ses affaires en catastrophe. Mais trop tard, désormais le soleil était couché et il faisait presque totalement noir.

    -Par où je suis arrivée déjà ? J’y vois rien du tout… commença-t-elle à s’inquiéter.

    Elle cherche en tâtonnant son portable.

    -Crotte ! Pas de réseau… et je n’ai plus que deux barres de batterie… Comment je vais redescendre moi ? Je ne peux pas rester là !

    En désespoir de cause, Ayani se leva donc et se dirigea donc à la faible lumière que pouvait lui procurer son téléphone portable. Elle prit une direction au hasard et commença à redescendre le long de la pente. Le fait qu’il n’y ait pas de sentier ne lui arrangeait pas non plus particulièrement ses affaires…

    Son portable émit alors un « bip » sonore avant de s’éteindre.

    -Zut ! Cette fois je n’ai plus de lumière, j’ai vraiment la poisse…

    Son pied glissa alors sur une pierre et elle sentit sa cheville la lâcher.

    -Aaaah !

    Elle glissa le long de la pente sans réussir à se stopper, une douleur lancinante lui traversant la cheville. Finalement son sac à dos s’accrocha à un rocher et sa chute se stoppa.

    -Ouf ! C’est pas trop tôt…

    Elle se massa le corps en cherchant si elle avait mal autre part mais à part sa cheville tout allait bien. A priori.

    -Maintenant je ne peux même plus marcher, sanglota-t-elle. A l’aide ! A l’aide ! S’il-vous-plaît, que quelqu’un m’entende !

    Une lumière aveuglante lui éclaira alors brusquement le visage. Quelqu’un venait d’ouvrir une fenêtre ! Une voix grave s’éleva alors dans la nuit.

    -Il y a quelqu’un ?

    -Oui ! Aidez-moi ! Je me suis fait mal à la cheville, je ne peux plus marcher !

    Une silhouette se dessina alors contre-jour dans l’ouverture et la voix rassurante prit de nouveau la parole :

    -J’arrive tout de suite ne vous inquiétez pas.

     

    Assise sur une chaise Ayani contempla l’endroit où l’inconnu l’avait emmenée. En fait, c’était probablement un refuge, une chance pour elle qu’il y ait eu quelqu’un dedans à ce moment-là. D’ailleurs ce quelqu’un était plutôt séduisant… C’était un grand blond de son âge a priori du type athlétique.

    -Ta… Votre cheville, comment va-t-elle ?

    -Je pense que je me la suis foulée… En la bandant je devrais pouvoir réussir à redescendre demain… Et tutoiement moi ! On doit avoir le même âge.

    -D’accord. Vous… Tu t’appelles comment ?

    -Ayani. Et toi ?

    -Kaoru.

    -Dis Kaoru, tu peux m’aider à retirer ma chaussure ? J’ai un peu de mal toute seule.

    Le galant jeune homme s’approcha donc d’Ayani, un air timide sur le visage. Il s’agenouilla et sa tête se retrouva ainsi au même niveau que la poitrine de celle-ci. Il se mit à rougir jusqu’au bout des oreilles et Ayani rigola intérieurement. Trop mignon !

    Après avoir déchaussé Ayani, il lui enleva sa chaussette et lui massa doucement le pied avant de lui faire un bandage serré. Un petit grognement de douleur échappa à Ayani et il ne manqua pas de le remarquer.

    -Ça va ?

    -Oui, oui…

    -Tu es sûre ? s’inquiéta-t-il en relevant les yeux pour les plonger dans ceux d’Ayani.

    Noyée dans un océan de marron piquetée de vert celle-ci sentit son cœur rater un battement. Ses yeux l’attiraient de façon inexplicable tout comme le papillon l’avait fait un peu plus tôt. Nageant dans un nuage de désir, elle baissa la tête alors que lui relevait la sienne. Sans hésitation ou presque leur lèvres se joignirent et son cœur chavira. Ne restait plus que cette douce et chaude sensation…

     

     

    -Trop nul ! Les vacances d’été sont passées trop vite ! Je veux pas retourner en cours…

    -Arrête de te plaindre Ayani ! Pars maintenant ou tu vas être en retard… Et rentre directement après les cours. Tu es punie de sortie pour un mois je te rappelle.

    -Oui maman, répondit Ayani en soupirant.

    Après le fiasco de cet été c’était plutôt normal. Avec Kaoru ils avaient réussi tant bien que mal à redescendre et ses parents fous d’inquiétude étaient à la limite de la crise de nerf. Compréhensible.

    Ayani ouvrit la porte et referma derrière elle, mais plongée dans ses pensées mélancoliques elle ne s’aperçut pas que quelqu’un était sorti de l’appartement voisin.

    -Aïe, tu pourrais faire attention !

    -Désolée, j’étais perdue dans mes pensées, s’excusa Ayani.

    Elle releva les yeux et la personne devant elle lui parut bizarrement familière…

    -Kaoru !?

    -Ayani… Enchanté de te revoir, désormais je serais ton nouveau voisin.

    -De même…

    -Au fait, je n’oublie pas que tu me dois un grand service ! Et un baiser… ajouta-t-il moqueusement, un sourire sadique lui étirant les commissures des lèvres.

     

     

    cette histoire a été entièrement inventée, merci de respecter l'auteure et de ne pas vous servir de ce texte à des fins personnelles