Blog contenant des histoires inventées et des poèmes
Je suis assise sur un coussin à quelques pas du trône en dessous du roi. Il montre ainsi à quel point il m’est supérieur. Dire qu’en fait ce tyran n’est qu’un homme torturé. Mais ceci n’excuse pas cela, comment peut-on se laisser aller comme ça ? Ne plus croire en l’humanité même après toutes ces années… Il devait aimer énormément sa femme.
Je contemple les bracelets qui m’enchainent à lui. Avec les fleurs ce sont les seules choses colorées qui ornent ma tenue. Je pense que chacun représente un élément différent car un petit symbole orne chaque bracelet, mais il y a beaucoup trop de couleurs. Et surtout elles ne correspondent pas. Du coup j’ai essayé de les assembler par paires de couleurs pour que ça fasse joli : prune et nacre, corail et jade, indigo et bronze, safran et turquoise. Je joue distraitement avec en les faisant coulisser le long des mes bras. Au moment ils glissent sur ma main, une douleur me vrille le ventre. Comme si on me plantait un pieu dans le cœur en le tournant en même temps. Le roi me jette un regard en coin et un petit sourire étire les commissures de ses lèvres. Il savait ! Et il ne m’a rien dit ! Quel… ! J’ouvre la bouche pour lui dire ce que j’en pense lorsqu’un héraut déclame : « la séance des doléances est ouverte ! »
Un flot de personnes entrent alors dans la salle du trône. Certains sont très bien habillés et ont l’air d’être des nobles, certains sont de simples artisans ou des paysans. Chacun leur tour, ils viennent se plaindre de ce qui ne va pas. Le roi hoche la tête mais ne dit rien, comme si tout lui était égal. Je commence à avoir mal aux fesses à force d’être assise sur mon coussin. En plus c’est d’un ennui ! Je me trémousse un peu pour soulager mes cuisses également endolories. Le roi se lève alors.
-C’est terminé, rentrez chez vous et revenez demain.
Les gens protestent un peu mais faiblement. Le roi se rassoit et attend que tout le monde soit sorti. Je me lève alors et effectue quelques pas, tout en restant dans la zone sans danger.
-Qu’est-ce que tu en as pensé ?
-Pardon Sire ?
-Ce qu’ils demandaient, qu’est-ce que tu es as pensé ?
Oulala, moi la politique c’est pas mon truc. Surtout quand un roi réputé être un tyran me pose la question. Je me décide donc par répondre par une autre question.
-Allez-vous leur accorder ce qu’ils demandent ?
Un sourire appréciateur flotte un instant sur son visage.
-La grande majorité non, leurs demandes sont futiles et n’apporteront rien de constructif. Certains problèmes, ils peuvent les résoudre par eux-mêmes. Je ne gouverne pas des enfants, ils peuvent se débrouiller en grande majorité seuls.
-Alors à quoi sert ce genre de réunion ?
Son visage se ferme et son regard se fait plus dur.
-A voir qui sont mes ennemis et à les éliminer. Définitivement. Mais également contrecarrer leurs plans par tous les moyens possibles.
-Pourquoi me dire tout cela Sire ?
Il ricane.
-Je ne risque rien, ce n’est pas comme si tu pouvais m’échapper.
-Et si je vous tuais ?
-Alors tu seras obligée de rester aux côtés de mon cadavre jusqu’à ta mort.
Quelle horreur ! Suis-je donc vraiment condamnée ? Catiel… je veux te voir, toi tu saurais peut-être quoi faire.
C’est alors que la porte de la salle s’ouvre à la volée.
-Qu’est-que … ? s’exclame le roi, gardes !
Une silhouette avec des ailes se découpe à contre-jour. Catiel ! Je me précipite vers lui lorsque l’inévitable douleur me coupe le souffle. Je tombe à genoux et deviens la spectatrice impuissante de la capture de Catiel.
-Catiel, non ! Tu n’as pas le droit de me laisser comme ça !!
Je le vois alors qui relève la tête vers moi, et il crie mon nom.
-Viviane !!
Il se débat comme un diable pour échapper aux gardes lorsque l’on me tire le bras en arrière. Le roi !
-Lâchez-moi ! Laissez-moi tranquille !
-Oh que non ! Tu m’appartiens !
Il me tire inexorablement vers la sortie située derrière le trône. Peu importe à quel point je le griffe, il ne me lâche pas. Désespérée je me retourne et vois Catiel se libérer et prendre son envol.
-Viviane !
-Catiel !
Dans un dernière geste désespéré, je donne un énorme coup de pied dans les parties du roi qui s’écroule comme une masse. Un peu expéditif mais au moins il m’a lâchée. C’est alors que Catiel se pose à côté de moi. Je me précipite dans ses bras.
-Oh Catiel ! J’ai eu si peur.
Je sanglote sur son épaule et il me caresse la tête doucement.
-Viviane, je ne savais plus que faire sans toi ! Ces dernières semaines ont été horribles, tu ne me regardais plus et le jour où enfin on pouvait être ensemble, tu as été capturée par la milice royale…
D’un instant à l’autre, les gardes surgiront et nous sépareront à nouveau... J’enlace Catiel plus fort encore et nous échangeons un long baiser. C’est alors qu’un rayon de lumière nous illumine, nous nimbant d’un halo chatoyant. Il fait jour ! Et Catiel m’embrasse !
Il me murmure à l’oreille :
-Viviane, mon amour, je t’aime tellement… Je ne veux plus jamais être séparé de toi. Peu importe que tout nous oppose, je ne veux plus me mentir.
-J’attendais ça depuis si longtemps, Catiel, ô Catiel, pourquoi m’avoir fait attendre si longtemps ?
C’est alors qu’un miracle se créé, nos ailes fusionnent littéralement. Nos couleurs respectives coulent sur les ailes de l’autre. Peu à peu, le bout ailes de Catiel s’éclaircissent : si elles restent noires à leur base, elles se dégradent dans des gris vers leur extrémité puis enfin deviennent toute blanche au bout. J’observe mes propres ailes et vois le même phénomène mais c’est exactement l’inverse. Mes ailes blanches se teintent de noir. Mais ce n’est pas tout, je plonge mon regard dans les yeux de Catiel…
« Une jeune fille blonde parle toute seule dans la bibliothèque. Elle a l’air idiot.
-Tiens quelqu’un qui parle à voix haute c’est pas courant ! Tu savais qu’on était censé se taire dans une bibliothèque ?
Elle rougit immédiatement.
-Bah, c’est bon hein, ça arrive à tout le monde.
Je la détaille. Elle est plutôt joie, mais un peu trop plate à mon gout. Par contre ses cheveux lui font comme une auréole. Elle ressemble un peu à un ange.
-Bon tu m’excuseras …
-Pas besoin de t’enfuir ! Tu sèches toi aussi ?
-S-Sécher ? , balbutie-t-elle.
Nos yeux se croisent, une étincelle brille dans ses yeux. Et je vois… »
«-Je te reconnais, je t’ai vue dans mes rêves..
-Et toi dans les miens.
Pourquoi faut-il que celle que j’ai désirée si fort dans mes rêves soit ainsi ? Jamais elle ne pourra me comprendre, tout nous sépare. Et pourtant je l’aime tellement. Tellement qu’une chaleur m’envahit rien qu’en étant proche d’elle. »
« Elle est assise à la fenêtre, les jambes dans le vide. Un vent léger agite sa chevelure. Je ne sais pas si elle m’a remarqué. Sa voix cependant s’élève.
-Tu peux venir tu sais.
Mon cœur fait un faux bon, il se met à battre la chamade. Je l’enlace, je l’aime tellement. Mais comment lui dire ? »
« Ses cheveux étalés sur l’oreille, son souffle s’accélère. Un mauvais rêve encore. Je lui caresse les cheveux et l’embrasse tout doucement.
-Chut, tout va bien. »
-J’ai pu voir ce qui t’a rendu heureux…
Je suis émue aux larmes, enfin je peux voir autre chose que de la haine et un désespoir sans fond. Mais je crois que c’est lui qui est le plus choqué d’entre nous…
-J’ai pu être heureux de te voir heureuse… Je ne ressens ni dégout, ni haine ! Je suis heureux de te voir heureuse…
-Il n’est jamais trop tard mon cœur.
Je lui souris et dépose un tendre baiser sur ses lèvres.
C’est alors que la voix du roi s’élève, nous coupant dans nos retrouvailles pour le moins originales et stupéfiantes.
-« Lorsque la femme aux ailes blanches du ciel sera tombée, prospérité, gloire et magnificence seront apportées au Royaume. Sa clairvoyance saura transpercer le mal qui fondra sous le soleil de l’été et lorsque ses ailes se teinteront de noir, une nouvelle ère s’ouvrira. »
-Mais de quoi parle-t-il ? s’interroge Catiel.
-C’est une prophétie qu’on lui a faite me concernant. C’est pour ça qu’il voulait à tout prix me capturer. On dirait qu’une partie s’est réalisée…
Je réalise alors qu’un cercle s’est formé autour de nous. Les gardes se sont rassemblés et nous regardent avec étonnement. Pourtant aucun d’entre eux ne fait mine d’esquisser un geste pour nous arrêter. Le roi nous regarde également avec étonnement. Et avec peine aussi.
-Vous vous aimez tellement… Pourquoi votre amour est-il si indéfectible ? Pourquoi n’ai-je pu vivre la même chose ?
-Sire, si je puis me permettre, n’est-ce pas vous qui avez brisé votre couple ? N’avez-vous pas fait quelque chose qui aurait pu chagriner la reine Anne ? Lui avez-vous portez toute votre affection ?
-Je l’aimais tellement… alors j’ai voulu créer un royaume en paix pour être à sa hauteur, pour qu’elle soit fière de moi. Malheureusement je l’ai délaissée, je n’ai pas vu sa peine… Que faire à présent ? Non seulement elle n’est plus à mes côtés mais en plus j’ai abandonné mon royaume en pensant que le monde lui-même était corrompu, qu’il ne valait pas la peine de se battre pour lui.
Cette fois c’est Catiel qui prend la parole. Il se penche vers le roi afin que seuls lui et moi puissions entendre ses paroles. Et ce qu’il dit m’étonne tout autant que le roi. Ce dernier ne sait plus que dire.
-Vous… vous feriez ça ?
-Oui, ce royaume est notre royaume, il appartient tout autant qu’à vous, qu’à nous citoyens qui l’habitons. Ce n’est pas un sacrifice mais un honneur. Nous espérons que les générations futures verront cela comme tel également.
Je tourne la tête vers Catiel qui hoche la tête pour montrer son approbation.
-Alors mes amis, je vous dis à bientôt, nous nous reverrons dans quelques années. Ne tardez pas, je me fais vieux et j’aurais beaucoup de choses à lui apprendre.
Il s’adresse ensuite exclusivement à moi.
-Viviane, tu ne pourras jamais ôter ces bracelets mais ils ne te retiennent pas particulièrement à moi. Ils matérialisent juste les barrières que ton esprit se forme, une fois celles-ci vaincues, tu retrouveras ta liberté.
C’est alors que je comprends, chacun de ces bracelets ne représentent pas un élément mais une émotion. Chacune de ses émotions pouvant lier un individu à quelque chose ou quelqu’un : la peur, la mort, la vanité, la jalousie, le désir, la possession, la haine et enfin l’amour.
C’est donc le cœur tranquille que je me détourne. La haine et la peur que je ressentais envers le roi n’existent plus. Je suis de nouveau libre. Catiel et moi nous envolons ensemble, main dans la main, vers notre futur commun. Nous ne sommes plus opposés mais complémentaires. Le chemin de l’un est celui de l’autre, et si des fois il se fait dur, désormais nous sommes deux pour affronter les difficultés. Trois avec Volte, mon petit compagnon si discret et dont la présence est pourtant si rassurante.
épilogue →
cette histoire a été entièrement inventée, merci de respecter l'auteure et de ne pas vous servir de ce texte à des fins personnelles