• Entre croire et savoir faut-il choisir ? 14/20

    Devoir sérieux et intéressant. Toutefois cherchez à organiser une réponse encore plus précise à la question posée. La question du "faut-il choisir", notamment, doit apparaître plus évidente.

     

    La croyance, du latin credere, est une adhésion incertaine ; lorsque l'on croit on n'a pas de réelles certitudes, on espère fortement. Savoir, quant à lui, vient du latin sapere "avoir de la saveur", d'où "avoir de la pénétration" puis "comprendre". Savoir implique une certitude et la possibilité que celle-ci soit démontrable par des procédés rationnels. Entre croire et savoir faut-il choisir ? Croire et savoir sont-ils compatibles ? Existe-t-il une réelle différence entre les deux ? Peut-on croire en sachant ? Les hommes croient-ils savoir ou savent-ils sans y croire ? Nous aborderons la différence entre croire et savoir (ou au contraire ce qui les rassemble) dans la vie quotidienne puis dans la religion.

     

    Tout d'abord, il faut noter que ces deux mots sont distincts, ce qui signifie qu'il y a bien une différence entre les deux, qu'elle puisse être infime ou importante ; sinon il n'y aurait qu'un seul mot.

    Du temps de Pythagore ou d'Archimède leurs savoirs, notamment mathématiques, reposaient sur des intuitions, ce qui implique une croyance car ces scientifiques croyaient en leurs intuitions. En effet, ils ne pouvaient démontrer parfaitement leurs idées, voire les bases des mathématiques. Pourquoi 2+2=4 ? Il est difficile de répondre à cette question car les chiffres sont des mots inventés par l'homme et nous apparaissent tellement évidents qu'il nous devient impossible de le démontrer. Toutes nos lois mathématiques reposent donc sur des intuitions donnant à des définitions pouvant être démontrées. Et c'est seulement en admettant celles-ci comme des savoirs que l'on peut démontrer la justesse de ces lois. Elles sont devenues des savoirs mais si on démontre que finalement elles sont fusses alors en fait elles n'étaient que croyances. Par exemple lorsque les scientifiques ont dit que c'était les charges positives qui se déplaçaient lorsqu'il y avait un courant électrique alors qu'en fait c'était les électrons. Ils croyaient pourtant que leur théorie était la bonne, pour eux c'était un savoir mais ce n'était en fait qu'une croyance, une mauvaise définition. Une croyance peut dont passer pour un savoir mais pas inversement. Si un savoir s'avère faux alors c'était une croyance passant pour un savoir. Si l'on dit que l'on croit qu'il va faire beau aujourd'hui et que cela s'avère juste ce n'était pas un savoir. Cependant les savoirs physiques, a contrario des mathématiques, se basent sur des observations. Si un s'avoir s'avère faux alors c'est que leur déductions étaient fausses ; leurs savoirs n'étaient que des croyances intimes, personnelles comme lorsque les anciens scientifiques invoquaient l'héliocentrisme ou le géocentrisme.

    De même on soupçonne l'existence de la vie extraterrestre : l'Univers est tellement grand qu'il est impossible que nous soyons les seuls êtres-vivants existants. Toutefois un doute subsiste, en effet on n'a pas prouvé cette théorie. Elle ne reste qu'une croyance plus qu'un réel savoir car les hommes espèrent fortement que cette vie extraterrestre existe. D'où ce grand débat : faut-il prôner l'existence d'êtres extraterrestres ? Oui mais ce n'est qu'une espérance, on n'en est pas sûr.

    On voit que lorsque l'on touche à la science (maths, physique, chimie...) il aisé de prendre parti entre croire et savoir car c'est une évidence. De plus ce sont des choix universels car partout dans le monde on transmet ces mêmes savoirs. Il n'y a pas de choix à faire pour nous à qui on transmet ces connaissances, ces savoirs. On nous l'a appris, on le sait ce n'est pas une croyance car les scientifiques précédents ont déjà fait ces choix. Pourtant autant il est facile de choisir entre savoir et croire dans sciences, autant cette différence est infime voire délicate à faire lorsque cela implique une personne, ou plutôt sa confiance en une personne. On sait que l'on a confiance en elle ou le croit-on ? C'est l'éternel test de la mise à l'épreuve... ici ce savoir n'est pas démontrable pourtant c'est une certitude pour nous. Mais il existe toujours un petit doute : la confiance absolue existe-t-elle vraiment ? Il n'y a pas de loi mathématique, ni de convention universelle : c'est un choix personnel plus qu'un réel savoir. Cependant la limite entre croire et savoir n'est plus aussi tranchée dans ce cas. Pour Descartes (Quatrième Méditation Métaphysique), la croyance est un effet de volonté : l'entendement conçoit les idées, la volonté y adhère, les refuse ou les mets en doute. La croyance est donc un choix propre à la personne que ce soit pour la confiance en une personne ou en Dieu.

     

    Si nous savions que Dieux existe vraiment, y croirions-nous encore ? En effet lorsque l'on croit on ne sait pas. C'est cette incertitude qui fait que l'on peut croire en l'existence de Dieu. Un film se base sur ce principe (cf Constantine) : Constantine sait que les démons, l'enfer, les anges et le Paradis existent. Il sait que Dieu existe. Cependant il ne peut entrer au Paradis car il ne croit qu'en lui. Bien qu'il sache qu'une entité supérieure existe, sa concrétisation lui ôte le doute existentiel à tout croyant. La croyance invoque forcément un doute, une espérance que telle chose ou telle personne se produise, existe. Le savoir nous ôte ce doute et donc la possibilité même d'y croire. Pourtant pour Saint Thomas se fut l'inverse : il a dit (en parlant de la résurrection du Christ)  "je croirais lorsque je verrais les marques faites par les clous sur les les mains du Christ". Pour lui ce fut différent, bien qu'il croyait en Dieu, il ne pouvait croire en la résurrection sans preuves concrètes. Cependant peut-on vraiment dire qu'il s'est mis à croire après avoir su ? Lorsque l'on croit, on a une version hypothétique du monde, d'un fait. Lui, il savait que c'était vrai même s'il ne savait pas pourquoi. Et comme ce fait est inexplicable (même de nos jours on n'a pas retrouvé le corps de Jésus) bien qu'il est existé  (pour les chrétiens), il bascule dans la croyance car on ne peut le prouver. D'où la célèbre sentence "heureux toi qui crois car tu as vu mais bienheureux celui qui croit sans avoir vu..." On peut parler ici de foi absolue.

    La relation entre croire et savoir est donc très ambiguë lorsque l'on parle de religions : beaucoup de philosophes se sont essayé à démontrer l'existence ou la non-existence de Dieu. Certains s'appuient sur des preuves : Descartes affirme que l'on peut démontrer rationnellement  son existence par la raison bien que l'homme ne puisse comprendre l'infinité de Dieu. Pour lui, l'existence de Dieu est donc un savoir car on peut la démontrer avec des preuves comme pour une loi mathématique. Pascal, quant à lui, pense à l'inverse de Descartes : "le coeur a ses raison que le raison ne connait point". Il affirme ici la supériorité de la foi sur l savoir pour prouver l'existence de Dieu. Kant s'oppose à leurs deux théories en montrant que toutes ces preuves de l'existence de dieu sont fausses et que ce n'est qu'une "hypothèse de la raison" motivée cependant par de la "pure croyance". L'existence de Dieu dans la chrétienté est donc une question de croyance, on ne peut la démontrer et le croyant ou le pratiquant est sans cesse confronté au doute. C'est ce doute qui permet d'évoluer, de progresser dans la foi chrétienne alors que la certitude fige l'esprit. Pour les musulmans c'est sensiblement différent car on n'a pas le droit de remettre en cause l'existence de Dieu. Il existe. C'est une certitude et ils ne sont donc pas confronté au doute ni au choix : savoir ou croire. De plus la loi islamique interdit cette remise en cause par quelque moyen que ce soit sous peine de châtiments voire de mort.

    Il faut toutefois différencier la croyance de la foi en Dieu car lorsque l'on croit on n'est pas sûr mais lorsque l'on a la foi on est sûr de ce en quoi on croit. La foi, de même, n'est pas incompatible avec le doute. Sainte Thérèse avait une foi profonde, inébranlable mais également un doute puissant.

    Et si l'existence de Dieu est sujet au questionnement croire ou savoir, l'existence après la mort l'est tout autant. On ne sait pas ce qu'il y a après la mort : est-ce vraiment comme Epicure le pense, une dispersion de nos atomes, ou y a-t-il vraiment un futur possible ? Personne ne l'a vécu (on ne peut vivre la mort puisque l'on meurt et dont par principe que l'on ne vit plus) et il n'y a dont aucun témoignage. Cette question demeure sans réelles réponses et celles-ci ne peuvent être que des croyances, des propositions hypothétiques. Ainsi toute réponse à une question existentielle n'est qu'une croyance : le questionnement sur la vie après la mort n'en est qu'un exemple.

    De plus c'est cette fin, cette incertitude qui fait que, d'après Freud, l'homme croit en Dieu. Pour se rassurer, pur se protéger l'homme croit en un "père plus puissant" qui le protégera, mais ceci ne serait qu'une illusion.

     

    Dans la vie quotidienne il est donc relativement aisé de différencier ces deux termes. Cependant lorsque cela concerne la religion, le choix est plus dur car dépendant de la croyance de chaque personne, de ses convictions personnelles.

    Toutefois savoir et croire ne sont pas parfaitement antinomiques comme "vrai" ou "faux". Ces notions peuvent se croiser tout en restant parfaitement distinctes l'une de l'autre car jamais équivalentes.

    Puisqu'un savoir n'en est un tant qu'il n'est pas prouvé qu'il est faux, existe-t-il un réel savoir ? Le monde n'est-il que croyance ? La quête du savoir de l'homme viendrait-elle du fait qu'il soit plus facile de vivre avec des certitudes que des doutes ?