• La libération passe-t-elle par le refus de l'inconscient ? 15/20

    Un très bon travail qui confirme vos capacités. Un plan en trois parties pourrait être plus habile. Continuez vos efforts.

     

    Une libération induit une perte d'entraves, de chaines. Quelles chaines entravent l'homme ? On pourrait citer les complexes, un mal-être latent, la société, les préjugés... La question "la libération passe-t-elle par le refus de l'inconscience ?" dirige donc notre réflexion vers : en quoi refuser l'inconscient nous libérerait, et de quoi ? refuser l'inconscient est-il le seul moyen de parvenir à une libération ? Peut-on se libérer autrement qu'en refusant l'inconscient ? Nous tâcherons de répondre à ces question en réfléchissant dans un premier temps sur "refuser l'inconscient c'est se libérer" et dans un second temps sur le fait que la libération passe par une nécessaire acceptation de soi.

     

    Freud, dans sa deuxième topique, définit l'appareil psychique en trois provinces  le ça, le moi et le surmoi. Le ça serait inconscient et inné, et contiendrait les pulsions. Le moi influerait sur le ça en régulant les passions de différentes manières : en les refoulant, les acceptant ou en les différant. Le surmoi contiendrait l'intériorisation des interdits parentaux et ferait donc pression sur le moi qui doit réguler les passions en fonction de la réalité et du surmoi. Freud écrit également : "est considéré comme correct tout comportement du moi satisfaisant les exigences du ça, du surmoi et de la réalité" ; ce qui nécessiterait un équilibre parfait or c'est impossible. Mais si l'inconscient n'existe pas, la conscience n'est plus tiraillée par l'inconscient : ce qui nous entrave, c'est que sans en avoir conscience, on est enchaîné par notre inconscient qui fait pression sur notre conscient. Le refuser, c'est donc retirer ce poids, cette pression, et si celle-ci n'existe plus alors on est libéré.

    D'après Freud, l'inconscient vit et s'exprime notamment par les actes manqués, les lapsus et les oublis qui témoigneraient d'une perturbation inconsciente influençant nos actes, eux, conscients. Mais aussi par certaines pensées considérées comme "parasites" voire "incongrues" dans certaines situations et que l'on oublie rapidement. Cependant ces réflexions ces oublis nous obligent à nous poser la question du pourquoi : pourquoi a-t-on dit cela ? pensé cela ? Comme lorsqu'un député au moment d'ouvrir la séance par "la séance est ouverte" a dit "la séance est close". Intérieurement, il s'est probablement posé la question "mais pourquoi ai-je dit cela ?" Si jamais on refuse l'existence de l'inconscient alors ce n'est plus un problème : ce n'est pas l'inconscient qui a parlé à notre place pour une obscure raison, mais juste une négligence, voire un défaut d'attention ou de concentration. En refusant l'existence de quelque chose dont par essence même on n'a pas conscience, on s'empêche de se troubler inutilement par des questions sans réponses immédiates.

    Pourtant accepter d'avoir une part inconsciente en soi, c'est accepter de na pas être totalement maître de soi-même et admettre que certaines choses échappent totalement à notre contrôle. Mais en les refusant, l'homme se rassure. Si l'inconscient n'existe pas alors il est parfaitement conscient de tout ce qu'il fait et n'est pas soumis à une chose incontrôlable. Indubitablement on serait alors libéré de notre peur de ne plus être nous-même, d'être relégué au rang d'animal soumis à ses pulsions et son instinct. Cependant ce serait une libération partielle car subsisterait encore d'autres entraves, chaînes que ne pourrait supprimer le seul refus de l'inconscient ; les préjugés et les complexes notamment. De plus, à long terme, l'expérience  s'accumulant, les évidences s'accumuleront et on ne pourrait plus continuer à prôner que l'inconscience n'existe plus. Cette négation alors devenue nulle, il faudrait repartir de zéro. Et si toujours on continue à soutenir sa non-existence alors se serait se mettre des œillères et ainsi s'enchaîner.

     

    Cependant l'inconscient fait, au même titre que la conscience, partie de nous-même. Le refuser c'est donc refuser une partie de soi-même et s'enchaîner délibérément. A contrario, s'accepter entièrement et sans discrimination permettrait de se débarrasser de nos complexes, de nos préjugés vis à vis d'autres personnes. En effet, en s'acceptant tel que l'on est, on n'est plus troublé par le regard des autres et on tend moins à juger sans savoir. Mais cela suppose d'accepter d'avoir un inconscient et de ne pas tout contrôler sur nous-même.

    Toutefois, il existe deux inconscients : l'inconscient physiologique et l'inconscient psychique. Autant il est facile d'admettre le premier : on sait que l'on ne sait pas tout ce qu'il se passe dans notre corps, autant le deuxième est  plus difficile à accepter : il faudrait se résoudre à se rabaisser au fait que l'homme est un être de pulsions, proche en ce sens de l'animal, et qu'il n'est pas parfaitement maître de lui-même. Cependant refuser l'inconscient psychique, cela induit que l'on sait tout sur soi ; or rien n'est plus faux. En effet, si on se refuse le fait de ne pas tout savoir, on a donc conscience de tout ; ce qui relèverait de l'omniscience et donc du divin. L'homme ne serait pas libéré mais encore plus enchaîné car Dieu est une image inchangeable et inaltérable. L'homme se refuserait ainsi le droit d'évoluer, ce qui revient à se fixer soi-même des limites et est donc à l'opposé de la libération. Ou alors on serait d'une "prétention intenable" d'après Freud, de soutenir l'inexistence de l'inconscient. Ce qui reviendrait à s'abroger le droit de nier l'évident ; "l'homme est obscur à lui-même" ou du moins une partie. Accepter cette partie inconsciente, plus sombre est donc une manière de rester homme tout en se libérant de notre prétention, ego. Toutefois accepter l'inconscient c'est également accepter ce qu'il entraîne or ce n'est pas forcément plaisant (lapsus, oublis, actes manqués...). Cela invite donc à faire attention en permanence et par ce fait on est enchaîné par notre propre réflexion, concentration. En se fixant pour objectif de ne pas laisser trop de marge à notre inconscient, on se fixe nos propres entraves car on ne peut pas lutter contre quelque chose dont on n'a pas conscience même si on sait qu'elle existe.

     

    Il découle donc de notre réflexion deux paradoxes : en refusant l'inconscient, on se libère mais seulement partiellement et pas sur le long terme. Et en acceptant pleinement cet inconscient et soi-même, on se libère de nos chaînes, complexes, mal-être... toutefois cette libération entraînerait une prise de conscience qui a posteriori nous inciterait dans nos faits et gestes à prendre en compte l'existence de cet inconscient et modifierait notre manière d'agir.

    Si la libération ne passe ni dans le refus ni dans l'acceptation d'un inconscient, par quoi passe-t-elle ? Comment pouvons-nous nous libérer durablement ? Est-il vraiment possible d'accéder à la libération par quelque moyen ?